Pour supprimer la liberté d'instruire son enfant en famille, le président de la République a choisi un bien mauvais timing. En 2021, s'il y a bien un désir unanimement partagé, c'est celui de préserver dans tous les domaines de la vie son droit de choisir, son droit à avoir une alternative. A ce titre, le fait de perdre le droit de ne pas instruire son enfant en école quand on juge que ce n'est pas la bonne solution pour lui est vraiment insupportable.
Éditos et analysesVers la convergence des luttes ?
23 novembre 20200

Cette menace concerne absolument tout le monde. Il est facile d’imaginer que son enfant ou petit-enfant ou son neveu puisse un jour avoir besoin d’être sorti de l’école publique, parce qu’il décroche, qu’il est harcelé, qu’il est porteur d’un handicap qui nuit trop à son apprentissage dans une cadre collectif….D’autant que faire l’école à la maison est la seule solution éducative abordable pour toutes les bourses et tous les milieux. C’est l’arme du pauvre face à l’échec ou au décrochage scolaire en ruralité profonde comme dans le 93, où les écoles privées sont trop rares ou trop onéreuses. C’est d’ailleurs tellement naturel que de nombreuses familles ne songent pas en toute bonne fois à déclarer officiellement. faire l’école à la maison. Retirer son enfant de l’école pour l’instruire soi-même quand cela se passe mal, c’est le b-a-ba des libertés !
Le timing est aussi désastreux parce que l’Etat annonce vouloir nous arracher cette liberté pourtant si naturelle, alors même qu’il nous retire déjà à tour de bras des libertés dans tous les domaines au nom de la sécurité sanitaire ou de la lutte anti-terroriste : liberté de circuler, de travailler, d’enterrer ses morts, de rendre visite aux siens, d’aller au culte, d’avoir une vie culturelle et sociale …Alors que l’exaspération monte tellement qu’on peut légitimement s’attendre à une explosion sociale, on vient nier une nouvelle liberté fondamentale qui suscite un attachement viscéral et inconditionné : nos propres enfants !
Enfin, le timing est explosif parce que l’Etat criminalise l’alternative à l’Education nationale au moment même où l’actualité montre, à travers des événements particulièrement tragiques, qu’il est incapable d’assurer ne serait-ce que la sécurité de ses professeurs et de ses élèves. Et les études PISA de l’OCDE démontrent de surcroît que il ne garantit pas davantage un niveau académique satisfaisant ou une lutte efficace contre les inégalités sociales. Faute de savoir comment se guérir lui-même de ses maux, l’Education nationale décide donc de tirer sur l’ambulance, en tentant de nous faire croire que c’est la vraie priorité nationale.
Cela ne leurre personne, et certainement pas les vrais défenseurs de l’école publique, qui savent que cette dernière, mal en point, a plus que jamais besoin de la soupape de sécurité que représente l’instruction en famille, pour gérer tous les cas que l’Education nationale ne sait pas gérer.
Ce projet de loi va contribuer à éroder la confiance des parents envers l’Etat et alimenter des formes de radicalisation nouvelles. L’inverse du but officiellement recherché. Il est encore temps pour l’Etat de renoncer à un projet si terriblement contreproductif et hors sujet.
Anne Coffinier et Axelle Girard