Chaque semaine apporte son lot de combats en matière de liberté scolaire, a fortiori dans une période où sont attaquées frontalement l’instruction en famille et les écoles vraiment libres.
EDITOS ET ANALYSES
7 novembre 20201

On parle de liberté d’expression ; moins de liberté scolaire. Mais distinguer ces deux combats n’a aucun sens. Défendre la liberté d’enseignement, c’est défendre la liberté d’expression. Et vice-versa. D’abord parce toutes les libertés découlent d’une lutte intrinsèquement démocratique, et qu’à ce titre, les libertés se valent au moins sur un plan à la fois historique et politique.
N’est-il pas aberrant de prétendre défendre la liberté d’expression en s’attaquant à une autre liberté, tout aussi vitale pour la conservation d’un régime démocratique et d’une vie sociale normale ? Abroger la liberté d’instruire ses enfants dans la famille est-il pertinent au nom de la lutte contre l’islamisme ? La bonne application de la loi et du règlement suffirait à détecter plus efficacement les signaux faibles qui existent, mais qui par définition et de facto ne sont pas majoritaires.
Entendons-nous, entendons-les bien. L’interdiction de l’instruction en famille utilisée comme moyen de lutte contre les dérives fondamentalistes n’est ni logique, ni efficace. Pire. Une telle interdiction reviendrait à faire une concession problématique à tous ceux qui veulent s’attaquer aux libertés d’une nation démocratique. Elle aboutirait en effet à céder un pan supplémentaire de notre liberté. Ce qui n’est ni défendable ni admissible.
Les contempteurs de la liberté scolaire s’en défendent. Ils parlent désormais de “limitation” de l’IEF… D’une simple réévaluation du champ de la liberté d’enseignement, si bien organisée dans notre pays que le Président prétend l’amputer d’une composante majeure, alors même que les rares chiffres disponibles sur l’école à la maison montrent qu’une écrasante majorité de familles la pratiquent pour des raisons légitimes…
Que recherche Jean-Michel Blanquer ? Et quelle serait la puissance, même symbolique, d’une mesure bientôt dépouillée de sa substantifique moelle et promise au destin d’une apparence de loi, dont le libellé symbolique ne constituerait qu’un modeste et temporaire satisfecit ?
Il est temps de rappeler aussi qu’une interdiction du recours spontané, mais dûment justifié à l’instruction en famille donnerait lieu à la production de kyrielles de certificats de complaisance pour soustraire des enfants à la vie sociale.
Une triple faute, historique, politique et même sécuritaire.
Axelle Girard
One comment
Jean-Pierre Verger
6 décembre 2020 at 1 h 03 min
Je suis enseignant dans le public mais je m’inquiète actuellement d’une dérive très autoritaire qui voudrait tout assujettir pour finalement n’offrir qu’une vision unique pour ne pas dire pour imposer assez rapidement un mode de pensée totalitairement unique. Je pense que la liberté d’enseignement doit être défendue du moment qu’elle respecte l’individu, enfant ou adulte. L’égalité n’est pas l’unicité. Et il n’y a pas d’égalité réelle possible sans liberté dans la fraternité. Il me paraît essentiel de sauvegarder une pluralité de démarches dès lors qu’elles s’inscrivent dans le respect des êtres, de tous les êtres. En matière de pédagogie, les différentes pratiques et méthodes ont toujours été des sujets de controverses, y compris dans le public. Et tant mieux ! C’est sûrement un signe de bonne santé. A travers elles l’humanité tâtonne. A ce titre, les écoles libres sont des laboratoires constructifs qui sortent de la rigidité d’un modèle imposé. Vouloir les interdire me semble pédagogiquement absurde et, au-delà, liberticide.
Jean-Pierre